Interview d'un géant : le Concorde

 

Il fit rêver la France et le monde entier : rencontre au Bourget avec le Concorde, 1er avion supersonique à transporter des passagers civils.

 


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Nom : Le Concorde

Mise en service : 1976

Concepteurs : Sud-aviation (Fr.), British aircraft corporation (Br.), Snecma (Fr.) et Bristol sideley (Br.)

Taille : 62.17 m de longueur

Envergure : 25.60 m

Poids : 185 000 kg de charge maximale au décollage

Capacité : 128 passagers, plus l'équipe de vol

 

 

L'Avenir de l'Avion Supersonique: M. Concorde, je suis très honorée de vous rencontrer, vous qui étiez le fleuron de l'aéronautique voilà 20 ans ... 


Concorde: 20 ans ! Depuis si longtemps, en êtes-vous sûre ? Je m'en souviens comme si c'était hier, tous les problèmes, les re  tards, les difficultés des partenariats ...                                                                                                                   


AAS: Il est vrai que votre conception a été longue et difficile. Mais vous souvenez-vous pourquoi vous avez été créé ?


Concorde: Si je m'en souviens ? Bien évidemment ! Et la raison est très simple : dans les années 50, l'aéronautique civile était dominée par les Américains, notamment grâce à Boeing. La France, malgré le succès de la Caravelle ( 1er avion de ligne à réaction, ndlr.), reste très en dessous de la technologie américaine. Pour mettre fin à cette domination, le gouvernement français, par l'intermédiaire du général De Gaulle, décide de frapper un grand coup en construisant le 1er avion supersonique civil : moi.


AAS: C'était très ambitieux pour l'époque !


Concorde: Oui effectivement. Néanmoins la France possédait toutes les connaissances techniques et scientifiques pour reussir ce défi, car c'en était réellement un. En effet, elle possédait déjà de nombreux avions supersoniques militaires construits par trois compagnies distinctes: Nord-Aviation et Sud-Aviation, toutes deux gérées par l'Etat, et Dassault, entreprise privée. Ce seront elles qui s'affronteront dès 1959 dans la course à l'appel d'offre de l'Etat pour réaliser l'avion supersonique du futur.


AAS: Et dès le début les problèmes commencent,... avec la voilure si mes souvenirs sont bons.


Concorde: En effet, tous les constructeurs, grâce à leur expérience, ont opté pour une aile delta (en forme de triangle, ndlr.), celle-ci ayant déjà démontrée ses avantages. Ainsi, son profil aérodynamique est non négligeable pour un avion dont la vitesse sera le principal atout. Mais, et cela se vérifie notamment au décollage, elle améliore la portance par la formation de petits tourbillons d'air au-dessus de l'aile.


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AAS: Vu comme ça, je ne comprends pas où est le problème. C'est même tout le contraire !


Concorde: Attendez, j'allais y venir. Si la portance est grandement favorisée au décollage, c'est l'atterissage qui pose problème. En effet, les ailes delta, ayant une voilure très petite, portent beaucoup moins à l'atterrisage qui promet alors d'être assez brutal. Et ce n'est absolument pas envisageable dans le transport de passagers ! Néanmoins, les ingénieurs de Sud-Aviation trouve le moyen de palier au problème : en allongeant les ailes le long du fuselage, on augmente la portance sans pour autant enlever les tourbillons qui favorise le décollage et qui en font l'intérêt. Ce profil est donc immédiatement adopté et me voilà doté de deux longs appendices sortant de ma carlingue. 


AAS: Et Sud-Aviation remporte, de fait, le concours. Mais jusqu'ici pas un mot sur les Britanniques, ils étaient pourtant associés dans ce projet n'est-ce pas ?


Concorde: Les Britanniques n'arrivent dans le projet qu'à partir de 1963. Le début de ma conception a effectivement déjà coûté des millions de francs et cela ne va pas aller en s'arrangeant. La France ne pouvant supporter seule les coûts et le Royaume-Uni ayant les mêmes ambitions supersoniques, un partenariat s'est imposé de lui-même.


AAS: Comment se sont alors réparties les tâches entre les différents acteurs ?


Concorde: Sud-Aviation s'occupait de mon fuselage arrière, de mes ailes et de mes trains d'atterissage tandis que les entreprises Snecma et Bristol Sideley, de mon moteur et la BAC, de l'ensemble de mon fuselage avant ainsi que de l'empennage.

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AAS: Ce sont donc les Britanniques qui se sont occupés de votre nez si caractéristique. Mais quelle en est la raison ?


Concorde: Tout d'abord, sachez que ce n'était pas une question d'esthétisme mais plutôt d'aérodynamisme. En effet, en volant à une vitesse supersonique, je produis des bangs soniques. Or pour les réduire et favoriser ma pénétration dans l'air, mon nez devait être très long, ce qui n'était pas sans poser quelques problèmes. Ainsi, à cause de la faible portance de mes ailes, je devais avoir un angle d'incidence élevé lors du décollage et de l'atterissage mais la taille du nez gênait la visibilité des pilotes. Ce qui évidemment posait problème. Malgré tout, les Anglais trouvent la solution en s'inspirant d'un avion de chasse : mon nez sera mobile. Il peut donc prendre 3 positions: 

- au décollage, il sera baissé de 5° par rapport à l'angle normal.     

- à l'atterrissage, il sera baissé de 12.5° 

- et enfin, pendant les phases de vol, il sera complètement relevé.


AAS: Ingénieux ! Mais le fait que vous voliez à une vitesse aussi élevée n'a pas posé d'autres problèmes ?


Concorde: Si. Je dois voler à Mach 2, soit environ 700 m.s-1 et le frottement que cela engendre peut faire monter la température de mon nez jusqu'à 1300°C ! Les ingénieurs ont alors été obligés de créer un nouvel alliage capable de résister à ces températures : l'AU2GN, matériau composite composé entre autres d'aluminium.


AAS: Que de problèmes pour vous concevoir !


Concorde: Et ce n'est pas fini ! Pour les ingénieurs, il reste une difficulté de taille: lorsque je dépasse le mur du son, mon centre de portance (point où s'applique la somme toutes les forces de portance, ndlr.), qui était auparavant équilibré avec le centre de gravité ( point où s'applique la somme de toutes les forces de pesanteur, ndlr.), se déplace jusqu'à 2m en arrière ! Ce qui a pour conséquence de me faire piquer du nez. Il faut donc me rééquiliber, ainsi à vitesse supersonique le carburant sera transphasé vers de nouveaux réservoirs situés à l'arrière.


AAS: Et bien, on peut dire que vous avez donné du fil à retordre aux ingénieurs.


Concorde: Et encore, ce n'est qu'un petit aperçu des mutiples problèmes que j'ai causés aux ingénieurs. Mais finalement ils en sont venus à bout.


AAS: En effet, votre 1er vol a ainsi eu lieu en mars 1969.

Cepandant, malgré toute votre avance technologique, vous n'avez pas rencontré un grand succès.


Concorde: Oui, mais que voulez-vous, je suis né à une mauvaise époque. En 1973, une importante crise pétrolière touche la planète entière. Or je consomme énormément de kérozène. Dès lors, toutes les compagnies, exceptées Air France et la BOAC ( la futur British Airways, ndlr.), annulent leurs commandes... Je suis alors cantonné aux vols de luxe ! mais au moins, je vole.concorde-6.jpg


AAS: Tout se passe donc pour le mieux... jusqu'au 25 juillet 2000 ...


Concorde: Jour maudit entre tous, une lamelle d'acier perdue sur la piste fait éclater mon pneu dont les morceaux de gomme perforent alors mon réservoir, me mettant ainsi le feu. Moins de 2 minutes plus tard, c'est le crash, 113 personnes périssent dans cette catastrophe. C'est aussi ma fin : je ne revolerais plus jamais après ça...


AAS: Triste fin pour un bijou de technologies comme vous. Néanmoins vous avez marqué l'histoire de l'aviation et à ce titre il est possible de vous voir au Bourget, à coté des plus grands.

Allez le voir, car il a l'air de s'ennuyer...


Concorde: Oh oui, pitié ! venez !

 

640px-concorde-le-bourget-fra-001.jpgsource: http://fr.wikipedia.org/ 

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